Titre : Étude de la composition et de la dynamique des planètes géantes : Préparation de la mission JUICE
Années : 2019-2022
Contexte scientifique : Observer les atmosphères de Jupiter et des autres planètes géantes (planétologie comparée) avec des observatoires terrestres et spatiaux (e.g. Odin, ALMA) pour caractériser leur composition et leur dynamique, en préparation à la mission JUICE (voir ce post) et les observations de l’instrument SWI (voir ce post).
Étudiant : Vincent Hue (actuellement Research Scientist au SwRI à San Antonio, USA)
Titre : Modélisation physico-chimique 3D des atmosphères des planètes géantes
Années : 2012-2015
Encadrement : M. Dobrijevic, F. Hersant, et T. Cavalié
Contexte scientifique : Observations à long terme et résolues spatialement des planètes géantes avec Cassini and ALMA
Objectif : Développer un modèle photochimique 2D et saisonnier pour les planètes géantes pour interpréter les observations spatialement résolues.
Résultats : Le modèle résout l’équation de continuité pour toutes les altitudes (résolution ~H/3), latitudes (résolution de 5°) et en fonction du temps (résolution de 10° en longitude héliocentrique). Le réseau chimique contient 22 espèces, 33 réactions et 24 photodissociations. L’évolution temporelle de la déclinaison solaire est calculée à partir des paramètres orbitaux (période, excentricité, obliquité, etc.) Le flux actinique est calculé avec un modèle de transfert radiatif 3D à géométrie sphérique. Le modèle peut être alimenté avec un champ thermique altitude-latitude saisonnier directement mesuré à l’aide d’observations ou simulé par un GCM (modèle de circulation générale). La diffusion turbulente horizontale et verticale (Kyy et Kzz) et le transport advectif sont implémentés. Enfin, l’effet des anneaux de Saturne est inclus.
Acetylène et éthane dans la stratosphère de Saturne, en fonction de la latitude. Comparaison observation-modèle (tiré de Hue et al. 2015).
Publications relatives au projet :
Hue, V., Hersant, F., Cavalié, T., Dobrijevic, M., 2018. Photochemistry, mixing and transport in Jupiter’s stratosphere constrained by Cassini. Icarus 307, 106-123 .
Hue, V., Greathouse, T. K., Cavalié, T., Dobrijevic, M., Hersant, F., 2016. 2D photochemical modeling of Saturn’s stratosphere. Part II: Feedback between composition and temperature. Icarus 267, 334-343.
Hue, V., Cavalié, T., Dobrijevic, M., Hersant, F., Greathouse, T. K., 2015. 2D photochemical modelling of Saturn’s stratosphere. Part I: Seasonal variation of atmospheric composition. Icarus 257, 163-184.
Cavalié, T., Dobrijevic, M, Fletcher, L. N., Loison, J. C., Hickson, K. M., Hue, V., Hartogh, P., 2015. The photochemical response to the variation of temperature in Saturn’s 2011-2012 stratospheric vortex. Astronomy and Astrophysics 580, A55.
Dobrijevic, M., Cavalié, T., Billebaud, F., 2011. A methodology to construct a reduced chemical scheme for 2D-3D photochemical models: Application to Saturn. Icarus 214, 275-285.
La détection de l’eau dans l’atmosphère supérieure (i.e. stratosphère) des planètes géantes par l’Infrared Space Observatory (ISO ; Feuchtgruber et al. 1997) a soulevé la question de son origine. Le piège froid troposphérique de ces planètes empêche le transport efficace de l’eau depuis leurs intérieurs (supposément riches en eau) vers leurs stratosphères à cause de la condensation. L’eau observée par ISO a donc une origine externe et résulte de l’ablation de micrométéorites qui proviennent de la poussière interplanétaire ou de leurs anneaux/satellites glacés, ou encore de large impacts cométaires. Tandis que l’eau stratosphérique de Jupiter provient des impacts de la comète Shoemaker-Levy 9 en 1994 (voir ce post), la situation de Saturne demeurait incertaine.
La sonde Cassini a détecté des geysers d’eau au niveau du pôle sud d’Encelade, une petite lune glacée de Saturne, en 2006 (Porco et al. 2006, Waite et al. 2006, Hansen et al. 2006). Les premières observations de Saturne par le télescope spatial Herschel ont prouvé que cette eau forme un tore à une distance de 4 rayons de Saturne de la planète, c’est-à-dire à la distance orbitale d’Encelade (Hartogh et al. 2011 ; voir ce post). Des modèles prédisaient qu’une fraction de l’eau émise par les geysers d’Encelade finaissait par tomber dans l’atmosphère de Saturne (Cassidy et Johson 2010). Il ne manquait plus qu’une confirmation observationnelle pour boucler la boucle.
Cette pièce manquante a été obtenue à partir de cartes de l’émission de l’eau dans la stratosphère de Saturne mesurées par Herschel en 2010-2011 avec l’instrument PACS (Photodetector Array Camera and Spectrometer). L’analyse des données démontre que la distribution méridienne (i.e. nord-sud) n’est pas uniforme (comme on l’attendrait dans le cas d’un apport par les poussières interplanétaires ou par un impact cométaire ancien) : elle est maximale à l’équateur et décroît exponentiellement vers les pôle. Sa distribution peut être modélisée par une gaussienne centrée sur l’équateur et de lageur à mi-hauteur de 25° de latitude. Ce résultat corrobore les prédictions des modèles d’apport par les geysers d’Encelade.
Distribution méridienne de l’eau dans la stratosphère de Saturne (fraction molaire à gauche et densité de colonne à droite), telle que déduite des observations Herschel. Figure extraite de Cavalié et al. (2019).
Lors de ses orbites finales, la mission Cassini a détecté un flux extraordinaire de particules provenant du plan des anneaux (Waite et al. 2018, Perry et al. 2018). Ce flux est plus fort que le flux d’Encelade de plusieurs ordres de grandeur. Il semble qu’il soit assez récent et demande à être confirmé par de nouvelles observations.
Référence: Cavalié et al. 2019, Astronomy and Astrophysics 630, A87.