IR-COASTER

Le rayonnement ultraviolet solaire est le principal moteur de l’évolution chimique dans le système solaire. De nombreux programmes expérimentaux au sol sont consacrés à l’étude de la photochimie de molécules en phases gazeuses, solides ou encore de molécules volatiles condensées à très basse température. Néanmoins, la validité de tels travaux et leur extrapolation aux environnements extraterrestres peuvent être mis en cause tant qu’ils n’ont pas été confrontés à des expériences similaires menées dans l’espace, avec exposition au spectre solaire étendu, tout particulièrement dans le domaine des courtes longueurs d’onde, inférieures à 200 nm, difficilement reproductible en laboratoire. Pourtant, la compréhension de l’évolution chimique dans des environnements astrophysiques contenant de la matière organique et inorganique (comètes, météorites, Mars, Titan, Europe, milieu interstellaire) requiert de telles études.

Nous cherchons donc à comparer le comportement photochimique de molécules organiques et inorganiques mesuré en laboratoire, à la « réalité terrain » que ces expériences sont censées représenter : l’exposition directe au rayonnement solaire au cours d’expériences réalisées en orbite terrestre. Mais au-delà du rayonnement UV, nous cherchons aussi à combiner l’effet des UV à celui des particules chargées (vent solaire et rayonnement cosmique). Même s’il est désormais possible d’envisager en laboratoire des simulateurs solaires plus fidèles que ceux qui étaient à disposition il y a une dizaine d’années, il est difficilement envisageable d’exposer dans les mêmes conditions, simultanément, une série d’échantillons de différentes natures à la fois au rayonnement UV solaire, mais aussi aux particules du vent solaire et du rayonnement cosmique. Cette étude nécessite des orbites différentes de celle de la Station Spatiale Internationale, qui rendront infaisable le retour des échantillons sur Terre. Nous avons donc souhaité rendre possible le suivi in situ de l’évolution des échantillons en orbite avec une nano-charge utile embarquée disposant d’un spectromètre infrarouge sous la forme d’un nanosat : il s’agit du projet IR COASTER (InfraRed-Cubic Orbital Astrobiology Exposure Research).

Le projet IR-COASTER sera déployé en 2 temps. Fin 2023, une version ISS configurée autour d’une architecture de type nanosatellite 6U sera intégrée au projet Euro Material Ageing (EMA) qui est constitué de la plateforme Sésame du CNES et d’IR-COASTER (Figure 10). Sésame est une expérience technologique d’exposition de matériaux qui ont vocation à être utilisés dans l’espace, afin d’étudier leur vieillissement et détérioration dans l’espace. IR-COASTER et Sésame cohabiteront sur la plateforme d’Airbus appelée Bartoloméo, qui est installée à l’extérieur du module européen Columbus. L’installation de Sésame et IR-COASTER est prévue pour fin 2022. Cette 1ère version d’IR-COASTER est développée au LISA. IR-COASTER versions ISS remplira alors un double objectif : 1. Il prolongera les expériences d’exposition de matière organique effectuées sur les plateformes EXPOSE, en les améliorant grâce au suivi de l’évolution des échantillons par un spectromètre infrarouge. Avec le bénéfice dans ce cadre à l’extérieur de l’ISS de pouvoir rapporter les échantillons sur Terre pour des analyses plus poussées : GC-MS, HPLC-HRMS. 2. La structure d’IR-COASTER constituera en elle-même un « échantillon » et un objet d’étude en science des matériaux pour les équipes du CNES et du LISA. En effet, les cubesats n’étant par vocation jamais récupérés après leur phase d’exploitation, la structure d’IR-COASTER conçue et réalisée avec les normes et les standards « CubeSat », deviendra un objet d’étude en elle-même. Cela reviendra à « exposer » un CubeSat à l’extérieur de l’ISS, et le rapporter pour étudier son vieillissement. Nous prévoyons l’utilisation de matériaux innovant pour la structure externe d’IR-COASTER : le Windform 2.0, dont les pièces peuvent être produites par impression 3D.

A terme, une nouvelle version d’IR-COASTER sera déployée comme un nanosatellite autonome, sur une orbite polaire. Les échantillons seront alors soumis à une combinaison unique de rayonnement UV et de particules chargées. Cette version nanosatellite sera développée en partie en proposant des projets étudiants dans le cadre du Campus Spatial UPEC.